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VOICI POURQUOI L'ALIMENTATION INDUSTRIELLE EST SOURCE DE MALADIES CHRONIQUES


L’industrie agroalimentaire transforme les aliments, qu’elle considère comme une simple somme de nutriments. Mais c’est nier leur complexité et conduire à des déséquilibres nutritionnels, cause de maladies chroniques. A l’inverse de cette logique « réductionniste », il faut appréhender l’alimentation de façon globale. La santé publique y gagnerait beaucoup.

  • Une histoire de potentiel santé

Quand on demande au grand public à quoi il attribue le « potentiel santé » des produits laitiers, des agrumes, de la viande ou des produits céréaliers, il répond en majorité et respectivement le calcium, la vitamine C, les protéines et les fibres.

Ces réponses, si elles sont partiellement vraies, sont aussi partiellement fausses. En effet, elles réduisent le « potentiel santé » des aliments à un seul nutriment. Or les aliments sont des matrices complexes constituées de centaines de nutriments.

C’est l’action synergique de ces nutriments et la structure de la matrice alimentaire dans laquelle ils sont inclus qui déterminent leurs effets protecteurs. Ainsi, le lait est un aliment extrêmement complexe, contenant des protéines et lipides très divers, des sucres, des minéraux, des oligoéléments et des vitamines également très variées. Le « potentiel santé » du lait ne peut donc être réduit au seul calcium. Les réponses habituelles du grand public traduisent à quel point le paradigme de la pensée « réductionniste » a envahi notre vision des choses.

En outre, pour l’exemple du lait, sachez qu’il est souvent plus délétère pour l’organisme car nous ne possédons pas, naturellement les enzymes digestives pour métaboliser la protéine des laits animaux, et ils sont donc, par nature, indigestes pour l’homme.

Par définition, l’approche réductionniste considère la réalité comme trop complexe pour être étudiée en tant que telle. Elle fractionne donc cette réalité en éléments isolés pour mieux l’approcher. En d’autres termes, on considère que le tout est égal à la somme des parties, c’est-à-dire que 1 + 1 = 2.

Dans la recherche associée à l’industrie agroalimentaire, cela a conduit à fractionner les aliments – simplement considérés comme une somme de nutriments –, puis à isoler des ingrédients pour les recombiner avec, bien souvent, addition de sels, de matières grasses et de sucres (afin notamment de leur redonner le goût qu’ils avaient perdu !).

  • Fractionnement à l’extrême

Le fractionnement du grain de blé en farine raffinée blanche, en son (l’enveloppe du blé) et en germe, illustre parfaitement les conséquences de ce réductionnisme technologique. Cela a conduit à mettre sur le marché des produits céréaliers très énergétiques et dépourvus de fibres et micronutriments protecteurs, comme le pain blanc ou les céréales du petit-déjeuner pour enfants issus d’une transformation technologique drastique puis enrichis en sucre, en matières grasses, en sel, et/ou parfois en minéraux et en vitamines. Ce crackingextrême des aliments se retrouve aussi dans le lait, les œufs ou la viande, menant à toujours plus d’aliments ultra-transformés.

  • Industrialisation néfaste

Ensuite, on essaye de corriger le déséquilibre nutritionnel occasionné par ces aliments ultra-transformés et consommés en trop grande quantité avec des compléments alimentaires ou des aliments fonctionnels (par exemple, les margarines enrichies en phytostérolsou les laits enrichis en oméga-3, censés participer d’une meilleure santé cardiovasculaire).

Ils représentent le stade ultime du réductionnisme nutritionnel. Or, l’évidence scientifique montre clairement que ces compléments n’améliorent pas la santé sur le long terme et qu’ils ne permettent pas de diminuer le risque de maladies chroniques.

Au contraire, le risque est parfois augmenté. Le réductionnisme a donc amené à considérer la nutrition préventive selon une perspective pharmacologique et les nutriments comme des médicaments qu’on pourrait isoler et administrer à forte dose.

De plus, dans le même temps que notre régime alimentaire évoluait, notre activité physique diminuait, et l’éducation nutritionnelle dans les cursus scolaires est restée insuffisante.

  • Les effets d’une mauvaise alimentation

Lorsque les aliments ultra-transformés constituent la base de nos régimes alimentaires, nous créons un terrain favorable au développement des maladies chroniques (au sens que lui donne l’Organisation mondiale de la santé).

Par exemple, la science montre clairement que l’adhésion massive à des régimes à base d’aliments ultra-transformés (comme le régime omnivore de type occidental, dit « Western Diet », riche en énergie et aliments raffinés ultra-transformés) observée dans certaines grandes villes augmente les risques d’obésité, de diabète de type 2 (le diabète non insulinodépendant), de maladies cardiovasculaires et de cancers (parmi les enjeux majeurs de santé publique), mais aussi de mortalité.

En France, selon les données de la Sécurité sociale, on comptait, en 2010, 539 083 décès, dont environ 36 % pouvaient être attribués directement ou indirectement à une mauvaise alimentation (24 % pour les maladies cardiovasculaires, 10 % pour le cancer et 2 % pour le diabète).

En 2014, on a atteint le chiffre de 50 % de la population adulte en surpoids (soit un indice de masse corporelle – IMC– supérieur à 25). Et, selon la Haute autorité de santé, en 2012, plus de 15 millions de Français souffraient d’une maladie chronique, ces dernières représentant près des deux tiers des dépenses de santé.

En raison de l’augmentation de ces prévalences de maladies chroniques, les années moyennes de vie passées en bonne santé tendent à diminuer (62 - 64 ans en 2009 pour les Français) tandis que l’espérance de vie théorique moyenne continue d’augmenter d’environ trois mois tous les ans (79 - 85 ans en 2009). On vit donc de plus en plus longtemps, mais de plus en plus longtemps en mauvaise santé, alors que, paradoxalement, le génotype humain est prévu pour vivre jusqu’à 120 ans en bonne santé !

  • La réalité complexe de la société

L’approche réductionniste généralise donc à partir du particulier, ce qui est risqué, voire faux. La réalité est en effet d’abord complexe et les problèmes de sociétés le sont également : les scientifiques devraient plutôt partir de la société et se servir de la science pour répondre à ces enjeux selon une perspective globale ou holistique.

Pour faire simple, l’holisme considère avant tout que « le tout est supérieur à la somme des parties », et donc que 1 + 1 > 2 ! Ceci est d’autant plus vrai pour la nutrition et plus généralement l’alimentation, qui sont par essence des sciences holistiques faisant intervenir des dimensions à la fois philosophique, religieuse, socioculturelle, économique, environnementale, comportementale, physiologique, métabolique…

  • Alors, quoi faire ?

Ainsi, plutôt que de chercher à corriger un régime déséquilibré par des compléments alimentaires industriels et chimiques dans une logique curative et réductionniste, il conviendrait de favoriser dès le départ une alimentation diversifiée et équilibrée à base d’aliments complexes peu transformés, et de privilégier des compléments d’origine naturelle, donc reconnus par nos cellules, pour éviter de tomber dans l’entonnoir des maladies chroniques.

En se préoccupant plus de la réalité complexe de la société, les chercheurs en alimentation pourraient davantage contribuer à améliorer la santé publique. L’approche holistique est donc aujourd’hui indispensable en nutrition aussi bien chez les diététiciens, chez les médecins nutritionnistes que chez les chercheurs en alimentation. Ce n’est qu’à ce prix que des recommandations nutritionnelles efficaces pourront être proposées au plus grand nombre.

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